Revenir, une semaine après
Pour revenir en bouclant la boucle de cette semaine de silence et en quelque sorte de deuil, la même photo, mais pas tout à fait, que lors de mon dernier post. Car j'ai l'impression de rester bloquée et de tourner en rond depuis tout ce temps, tétanisée par trop de mots, trop d'images, trop d'émotions, de belles choses vues, d'horribles aussi, de réflexions diverses et variées, mais toujours la même tristesse, la même peine, toujours ce noeud dans la gorge et l'espoir que je vais me réveiller en me disant que ce n'était qu'un affreux cauchemar. Mais non.
Ce soir du 7 janvier j'avais une séance photo prévue depuis longtemps, sinon je serais allée au rassemblement à Lyon. Mais j'ai fait des photos. Je remercie Mejika de m'avoir prêté sa main et son bras pour faire celle-ci, tout comme la précédente.
C'est là dessus que je veux rester, malgré tout ce qui s'est passé entre temps, et même si bien sûr je suis de tout coeur avec toutes les victimes et leurs familles, mais tant de choses ont été écrites, inutile de rajouter mes pauvres mots. La même photo, au crayon blanc. Ou au crayon gomme. Et ma signature, plus grande que d'habitude, car j'ai la certitude que l'encre, les crayons, les stylos, qu'ils soient pour écrire ou pour dessiner, et aussi les photos, sont en quelque sorte des lumières de l'ombre.
Portée par l'émotion collective ce 7 janvier, j'ai écrit "Je suis Charlie".
C'est vrai bien sûr dans la mesure où "Charlie" est un symbole, celui de certaines valeurs auxquelles je tiens, la liberté d'expression, de penser, d'écrire, la liberté tout court, le droit de pouvoir rire de tout, c'est aussi le symbole de ma jeunesse. "Ils" ont un peu tué ma jeunesse aussi. Mais Charlie est un symbole différent pour chacun...
Mais bien sûr c'est faux, je ne suis pas Charlie, je n'ai ni leur courage, ni leur talent. Et pas toujours le même humour il faut bien dire.
Cependant j'ai le sentiment de devoir à leur mémoire d'essayer de le devenir un peu. Leur mort est déjà suffisamment idiote pour qu'en plus elle ne serve à rien...
Alors on va j'espère continuer à vivre, même avec ce bout de crayon planté dans le coeur comme une grosse épine qui fera toujours mal, mais continuer à faire l'amour, l'humour, la vie, la liberté, l'impertinence. Et des photos... Sans peur.
Et même si celle-ci est une photo symbole, et qu'ils n'aiment pas les symboles. Clic, pour ce texte que j'ai beaucoup aimé, le dernier que je veux retenir aujourd'hui, écrit par Luz du coeur de Charlie Hebdo. "Notre boulot de dessinateur est de mettre le petit bonhomme au coeur du dessin, de traduire l’idée qu’on est tous des petits bonhommes et qu’on essaie de se démerder avec ça. Ceux qu’on a tué étaient juste de joyeux incroyants qui dessinaient des bonhommes. Et aussi des bonnes-femmes. Et là, ils sont nulle part. Comme tout le monde."
Et je suis triste. Et ça sert à rien d'être triste. Cabu n'aurait pas aimé, lui qui riait toujours... Il faut avancer.
Mais surtout CLIC.